mercredi 17 janvier 2024

La tour


Je connais les mots pour décrire la curiosité.

Milán. Milano. Tilou. Petit poulet.


Lorsqu’il m’a tendu les bras, ce n’était pas pour faire des gazous dans ceux de son grand-père.


Une fois en hauteur, Milano a pointé du doigt la poêle dans laquelle son père faisait frire des œufs.


Cinq œufs. Quatre tournés et un brouillé. Celui de Milano.


Plus je m’approche de la poêle, plus le petit penche le corps vers l’avant.


Les yeux vissés dans les œufs.


Le verbe frire ne se conjugue pas au pluriel. On n’écrit pas Les oeufs frient. Les oeufs sont en train de frire.


Le son de friture est le même que celui d’une douche ou de la pluie. Un son blanc.


Les yeux de Milano sont de couleur feu.


La curiosité est un volcan.


Il est rivé à ses oeufs et moi, à ses yeux.


Milano a 16 mois. Dans la cuisine chez lui, il monte les trois marches d’un petit escabeau en bois.


L’escabeau s’appelle une tour. Une tour pédagogique, dit la notice. C’est fou, ce qu’on peut faire dire aux mots pour les mettre en marché.


Le pédagogique n’est pas la tour, mais ce que l’enfant en fait.


Un jour, sur un bateau d’excursion, ma jeune fille s’est amusée pendant une heure et demie avec un contenant de jus vide et une paille.


Elle a créé un jouet en jouant avec.


Le contenant ne contenait pas de jus pédagogique.


Une tour imaginaire rapproche des nuages. Comme la proue du bateau rapproche de New York.


Une tour de trois marches élève la curiosité.


Ces trois marches n’appartiennent qu’à Milano.


Du haut de son perchoir, il observe le monde au même niveau que ses parents. Il se tient debout, protégé par une petite barrière.


Sans les marches, Milano aurait attendu six ans pour atteindre ce niveau.


Dans mes bras, il se tient à hauteur de 18 ans.


Tilou observe sa mère préparer des panais.


Milano donne un coup de pouce à son père pour démarrer la cafetière.


Trois marches pour atteindre un moment précieux en famille.


Nous allons manger.




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