jeudi 30 avril 2020

Ciné-parc


Tout a commencé le 12 mars.

Ce jour-là, le Québec passe d’une économie du profit à une économie de la santé.

François Legault, premier ministre du Québec, l’a annoncé à la télé.

Il ne l’a pas dit comme ça. Il a parlé d’avenir.

Si vous voulez gommer le passé, parlez d’avenir. C’est le principe de la publicité.

Le nouveau mot clé est santé. Il est accompagné de confinement, de communautaire et de distance.

Pour ne pas contaminer ton voisin, reste chez toi.

Nous sommes devenus des covidés, la rencontre de Sapiens et du virus COVID-19.

Les présentations quotidiennes du premier ministre François Legault sont des bijoux de communication. Il tient sa ligne depuis le début : la santé.

La première victime du virus est l’affection.

Serrer les coudes à deux mètres de distance, dit Patrick Emiroglou.

Ne pas dire adieu à ta mère qui meurt.

Ne pas serrer mes filles dans mes bras.

Deux mètres, c’est le contraire de la rentabilité.

Nous passons du cinéma au ciné-parc. Femme, espace, homme, espace, enfant, espace.

Salle comble au Stade olympique hier : vingt-mille billets et quarante-cinq mille espaces vendus.

Les lettres et les mots sont épargnés, h   e   u   r   e   u   s   e   m   e   n   t   .

L’avion a transporté le virus. Cela s’appelle une pandémie de masse ou comment fabriquer la corde pour se pendre.

Nous avons grandi dans la distanciation sociale. L’est et l’ouest de Montréal, Westmount et St-Henri, haut de duplex et split level.

La distance est physique, deux mètres. Comme une boite vocale.

Première conséquence du virus, l’État prend en mains toute l’organisation sociale. Les entreprises sont mises au pas.

Dans La part d’ange en nous, Steven Pinker suggère que le bien collectif est un des facteurs de la diminution de la violence dans le temps.

Tu m’es utile, je te suis utile, nous sommes plus efficaces à deux. Une raison de ne pas nous occire.

Nous ne reviendrons pas en arrière.

Ce virus est la plus belle chose qui pouvait nous arriver.




mercredi 22 avril 2020

Les pandémies que j'avais



Les pandémies et les confinements sont appelés à habiter notre quotidien.

On parle de pandémie en cas de propagation mondiale d’une nouvelle maladie, écrit l’Organisation mondiale de la santé.

La nouvelle toile de fond de notre vie n’est pas faite d’avions, de capitalisme et de consommation.

Même les algorithmes sont mêlés, plus personne ne bouge.

La nouvelle toile de fond est la survie. Il est minuit moins une, Sapiens, dit la nature.

Un virage de cent-quatre-vingts degrés en un mois. Jamais l’humanité n’aura été aussi rapide.

La fonte des glaciers est une pandémie de consommation.
Covid est une pandémie d’avion.

Et dire qu’on accuse la chauve-souris et le pangolin. Sacré Sapiens. Il n’y a que lui pour répandre aussi rapidement une mauvaise nouvelle.

La première libère du méthane dans l’atmosphère. La seconde, un virus.

Pour la plupart d’entre nous, l’eau qui monte à Venise, Percé et Vancouver, c’est loin.

Covid peut être dans notre dedans. C’est moins loin.

Le méthane et le virus portent le même message: l’eau monte, Sapiens.

Les priorités s’alignent.
La nature sur l’homme (la femme est plus intelligente que ça).
La science sur la religion.
Les lettres sur les chiffres.

La connaissance sur l’ignorance?
Un ami m’appelle. Covid est un complot pour contrôler le travail au noir. Nous n’avons pas parlé de soucoupes volantes.

Au début des années 80, je vois le président américain Ronald Reagan à la télé. Il me passe l’idée que jamais l’Homme ne sera assez intelligent pour régler ses problèmes par lui-même.

Couper le moteur de l’auto ne fait pas revenir les glaciers.

Rester chez soi n’élimine pas le virus. Il reviendra.

1961. Le Bonhomme Sept Heures, une pandémie d’enfant. Il surgirait du coin de la rue ou d’un arbre. Il se trouvait dans ma tête. Ce qui est dans ta tête à six ans est forcément partout.

John, Paul, George et Ringo au Ed Sullivan Show, le Dimanche 9 février 1964. Ils étaient dans la télé au sous-sol, les cheveux dedans le vent.

Josée Cadieux avait huit ans et moi, dix.

Les pandémies que j’avais.

Personne n’a cherché un vaccin.