vendredi 25 décembre 2020

Inconvenient Indian



The Inconvenient Indian est le titre d'un livre de Thomas King. Un livre non romanesque, écrit Wiki.


Thomas King est un auteur canadien d'origine américaine. Cherokee par son père, grec par sa mère, il est né à Sacramento, en Californie, écrit Britannica.


The Inconvenient Indian est le premier ouvrage à avoir dépucelé mon ignorance, enseignée dans les cours d'histoire, à l'école primaire.


Primaire est le mot.


Il y a eu ensuite Two families, de Harold. D. Johnson, mais bon, on n'est dépucelé qu'une fois.


Thomas King raconte que l'indien avec des plumes est mort. Il n'existe plus que dans les fantasmes et les écrans.


Michelle Latimer a réalisé le film documentaire Inconvenient Indian.


Elle vient de se faire dépuceler de ses origines autochtones.


Elle revendiquait une identité anichinabée de Kitigan Zibi, près de Maniwaki, écrit Radio-Canada. Cette identité a été contestée, suite à une enquête de la CBC. 


Depuis, elle ne revendique tellement plus rien que son documentaire a été retiré du festival Sundance, au Utah, en janvier 21.


L'affiche Inconvenient Indian est un beau "fuck you" sur fond rouge.


Michelle Latimer est littéralement en train de perdre des plumes.


La réalisatrice met en vedette l'identité autochtone de Thomas King, tout en mentant sur la sienne.


Elle braque sur elle les projecteurs qu’elle prétendait offrir au Cherokee.


Une des caractéristiques de la colonisation est de promouvoir sa propre image au détriment de celle de l’autre.


La première victime de ce mensonge est l’enseignement de Thomas King et avec lui, celui des Premières Nations.


Un caillou dans le soulier du mouvement de décolonisation.


La décolonisation consiste à comprendre que je vis sur une terre volée. Je ne peux donc inviter l’autochtone chez moi, puisque je suis chez lui.


Par exemple, « Amérique » est une vision européenne du continent. « Ile de la Grande tortue » est la réalité autochtone du même continent.


Du moment où je comprends cela, un domino tombe, puis un autre, puis un autre.


Comme je suis curieux, je vois ce qui se cache derrière. Comme Truman Burbank, dans « Truman show », lorsqu’il va voir ce qui se cache derrière le trou percé dans son horizon.


Mettons que ça fout mal un générique.


Inconvenient Indian a été reçu bien au Festival international du film de Toronto, en septembre.


Il faut voir le film.


Thomas King est un vrai Cherokee.




mardi 15 décembre 2020

Une histoire d'à côté

 

Martin Picard a passé une partie de la fin de semaine chez moi.


Martin Picard. Le chef. L’entrepreneur. Celui qui a fait du sirop d’érable une science, à sa cabane à sucre de Mirabel. Celui qui fait de la télé un délice.


Celui qui crée, à force de ne pas faire comme les autres, mais à côté.


Je l’écoute depuis des années à la télé sans jamais y avoir goûté.


Il y avait à table le menu hivernal de La cabane d’à côté.


La cabane d’à côté, c’est celle qui est là, mais à côté.


Que penses-tu de telle chose? Je pense à côté.


À côté de la Cabane Au pied de Cochon, elle-même loin à côté du resto Au pied de Cochon, rue Duluth, à Montréal.


Bref, six assiettes de délire chez nous, en fin de semaine.


Martin Picard me rappelle mes belles années chez Cossette.


Trouvez des idées. Voyons si nous pouvons les réaliser.


Une fois que tu penses de même, tu ne veux plus changer. Comme un chef qui ferait du sirop d’érable une science au service de la jouissance.


Comme David McMillan et Fred Morin chez Joe Beef. J’ai lu leurs deux livres et j’y suis allé une fois. Un cadeau.


Comme Antipasto, à Mont-Tremblant, Saint-Jovite pour les intimes.


Quand on me demande ce que je fais, je dis que j’enseigne la rédaction.


Comme les gens ne sont pas curieux, l’affaire arrête là.


Si les gens étaient curieux, je dirais j’enseigne la rédaction par la lecture. Lire un texte, les idées, les gens, les tendances, le design, l’architecture.


Écrire une façon de penser.


Michel Dallaire écrit le Bixi comme un boomerang. Steve Jobs écrit le siège social de Pixar comme une rencontre. Le Musée des Beaux-Arts de Montréal écrit l’exposition Fabuleux Fabergé comme un texte.


La curiosité est un geste de lecture.


En fin de semaine, Martin Picard m’a fait lire Soupe aux pommes de terre, garniture de poireaux, patates et lardons.


Saumon fumé bio laqué au sirop. Gribiche de nos poules et chou fermenté, épinards.


Remarquez les phrases: un sujet, un verbe sauté, une assiette d’à côté.


Offrez aux gens que vous aimez la cuisine qu’ils aiment. Nous avons besoin d’amour par les temps qui courent.


Les chefs aussi.


Ça fait du bien de lire autre chose.


Une histoire de sirop d’érable.





samedi 12 décembre 2020

Nos élus

 

La photo de lapresse.ca montre Méganne Perry-Mélançon, Sonia Lebel, Ian Lafrenière, Véronique Hivon, Harold LeBel, Pascal Bérubé et Marwah Rizqy.


Sept élus. Ils ont été élus les meilleurs par les autres élus.


Meilleur orateur, meilleur parlementaire, étoile montante, meilleure représentante de sa région, plus bel esprit sportif, députée la plus originale, la plus appréciée, la plus tenace.


Tous les députés auraient mérité de gagner, titre le titre.


La photo montre un moment figé. Ce qu’elle ne montre pas, ce sont les liens qui unissent ces élus de partis différents.


Je paraphrase le journaliste Hugo Pilon-Larose: ils étaient comme des larrons en foire, au moment de prendre la photo.


Après avoir vu la série « Nos élus », à Télé-Québec, je savais cela.


Cette série de quatre épisodes montre des élus au Parlement, dans l’auto et à la maison. Bref, au travail.


Députés, ministres, Québec, Montréal, Abitibi, Rimouski, des petits bonheurs et des petits malheurs.


Le réalisateur Louis Asselin aime ces gens. Il filme avec sensibilité un métier dont nous avons oublié la nature.


Des élus nobles dans un métier noble.


Ça fait du bien.


Ces élus font des défauts des qualités.


Ils partagent leur partisanerie.


Ils se lancent des éloges. Ils règlent des problèmes.


Au lieu de dire nous allons faire la politique différemment, ils la font.


Bâtir est une affaire de confiance.


Le citoyen au centre, les élus à la défense.


Ce sont des faiseux.


Les mots servent à documenter les dossiers, pas à un slogan.


Vous direz c’est la pandémie. C’est plus que ça, c’était avant ça.


C’est la noblesse et l’humilité. Je suis ici pour quelqu’un qui a besoin de moi. En votant pour moi, il a voté pour lui.


Si vous cherchez de quoi chasser le gris, regardez « Nos élus ».


Ils me donnent le goût de travailler avec eux.


Dans sa chronique « Le cauchemar, revisité », jeudi, Yves Boisvert écrit que nous avons manqué d’humanité dans notre façon de traiter nos ainés des CHSLD.


Humanité. Voilà le mot que je cherchais.


Humanité veut dire revenir à l’essentiel.


Si vous cherchez aussi ce mot, il se trouve à Québec, lorsque le Parlement siège. Ou dans l’auto. Ou à la maison. Au travail.


Ou à Télé-Québec ou dans lapresse.ca, lorsque l’écran est ouvert.


Il faut être ouvert pour être comme eux.


Nous les avons élus.





lundi 30 novembre 2020

Silence aveugle

 

Nous assistons à une rencontre qui n’aura pas lieu.


J’aime beaucoup François Legault. Il excelle dans sa gestion de la pandémie. Je ne vois pas qui aurait fait mieux.


François Legault est un pragmatique, un gars de terrain. Un pragmatique, ça travaille dans le concret.


Décider en quelques minutes de fermer une province doit donner un certain vertige.


Il n’a pas badiné avec le disque, comme disait l’humoriste Jean-Guy Moreau.


Depuis le 13 mars, le mot « santé » a tassé les mots « économie », « profit », « rendement » et « croissance ».


L’homme d’affaires a tout de suite vu la priorité. C’est rare en politique.


Le pragmatique s’arrache difficilement du concret.


Dès qu’il tombe dans l’immatériel, le systémique, la finesse, les yeux arrondissent, le sourire fige, la peau pend, il devient gris.


La finesse est un tout petit espace où loge beaucoup de bonheur. Elle ne se trouve pas dans l’objet, mais dans celui qui observe.


C’est le 3ème concerto Brandebourgeois de Bach, joué par le Philarmonique de Los Angeles, dirigé par Pinchas Zukerman.


Pas Karajan, Zukerman.


Pas CD, vinyle.


J’aime beaucoup Ghislain Picard, chef de l’Association des Premières Nations Québec-Labrador. Il représente l’image que je me fais des Premières Nations.


Après avoir vécu des millénaires dans la nature, les Premières Nations ont développé une sensibilité unique.


Enseigner par la parole des milliers d’années d’écoute.


Les ainés racontent aux jeunes un rapport naturel avec l’immatériel.


Quand il est question de finesse et de systémique, Ghislain Picard est là. Je le vois bien discuter avec René Lévesque ou Lucien Bouchard.


Avec François Legault, la rencontre n’aura pas lieu.


Le pragmatique nie le racisme systémique. Son gouvernement a rejeté une motion en ce sens, cette semaine, à l’Assemblée nationale.


Le refus d’adopter le principe de Joyce est reçu comme une gifle par les Attikameks, sous-titre Le Devoir du 28 novembre.


Je suggère que François Legault a seulement été cohérent. Il n’est pas du genre à gifler. Il n’est pas violent.


Le problème du pragmatique n’est pas le systémique, c’est la transcendance, l’immatériel.


François Legault ne voit pas quelque chose, c’est tout. Silence aveugle. Je ne peux pas lui en vouloir.


La non-rencontre d’aujourd’hui est écrite dans le ciel depuis deux ans.


Il y a deux ans, François Legault ne s’est pas présenté à des rencontres avec des chefs des Premières Nations. Comme s’il s’agissait de communautés d’immigrants, comme nous.


Les Premières Nations font partie d’une classe à part. Lisons notre histoire. Pas celle enseignée à l’école, la vraie.


François Legault ne bougera pas.


L’immatériel, c’est ce qui existe et que tu ne vois pas.


Comme tu ne le vois pas, il n’existe pas.





vendredi 23 octobre 2020

Noir péjoratif

 

La dernière fois que j’ai parlé du mot « nègre », c’était au début des années 80.


À la taverne Le trappeur, près de l’UQAM, mon ami nigérien Bory Seyni m’explique la colonisation de l’Afrique par les européens.


Ce cours d’histoire fantastique m’est raconté pour la première fois par quelqu’un qui en vit chaque jour les conséquences.


Je reprends. J’assiste au récit fantastique d’une histoire dramatique.


Assis à une table voisine, un touriste Belge demande à mon ami Bory de quel pays il vient.


De la même façon que Bory refuse les frontières européennes de son pays, il refuse de répondre.


Une réponse fantastique à une histoire dramatique.


Les frontières africaines de Bory sont naturelles, les ethnies, les montagnes et les rivières.


Je mesure pour la première fois la profondeur de la blessure.


Je regarde ces jours-ci la série « Les routes de l’esclavage », d’ARTE, sur Savoir.tv. Un livre d’histoire en quatre épisodes.


L’esclavage existe depuis 1500 ans environ.


L’esclavage a toujours été une affaire économique. Les esclaves ont servi de puissance motrice aux économies. Ils ont été remplacés par le pétrole.


Esclave vient de slave. Difficile d’être plus blanc.


L’esclavage est devenu Noir dans les années 1400.


Les mots « Blanc » et « Noir » sont apparus dans les années 1700, en même temps que le racisme.


Sacré Sapiens. Il n’y a que lui pour séparer les couleurs dans une famille de cousins. On se croirait dans une salle de lavage.


Il n’y a que lui pour parler de racisme, alors que l’humanité ne compte qu’une seule race.


Les Africains utilisent le mot « frère ». Je n’en connais pas de plus juste.


Un jour, à Niamey, au Niger, mon ami Bory m’a présenté comme son frère blanc. C’est le plus beau compliment que j’aie jamais reçu.


Si j’enseignais à l’université d’Ottawa, comme cette dame à qui on reproche d’avoir bien fait son travail, je ne m’excuserais pas. Je n’ai pas à m’excuser de faire mon travail. Au mieux, je serais désolé de constater tout ce foutoir de merde, créé par un environnement en délire.


Cette histoire est celle de monde qui vire capot, tout simplement. Du même genre que les hystériques « Slav » et « Kanata ».


Sortir un fusil pour tirer une mouche.


Je recommande Advil.


Le premier ministre Legault parle de dérapage. Ça dérape solide, diraient les mots pour le dire.


Je suggère l’expression « Noir péjoratif ».


Elle servirait au racisme (il n’y a qu’une race humaine, faut-il le rappeler), d’équivalent de « non-voyant », pour « aveugle », et de « malentendant », pour « sourd ». Des mots bonbon pour se donner bonne conscience de ne pas dire les mots pour le dire.


Des mots pour contrôler la pensée des autres.


L’enseignement consiste à présenter les mots dans leur contexte. Le premier mandat de l’enseignant face aux mots est le respect.


Allez viens, Sapiens, on va changer la couche.







mardi 13 octobre 2020

Magazine

 

Je viens d’apprendre quelque chose.


Magazine vient de magasin, un entrepôt de marchandises, écrit Anthony Galluzzo, Du magasin au magazine, dans Le monde diplomatique.


Le magazine offre des marchandises. Nous n’allons plus au magasin, les marchandises viennent à nous.


Le magazine est le premier média de masse consacré exclusivement à la consommation, écrit Anthony Galluzzo.


Pour cela, le magazine et ses copains, journaux, catalogues, lithographies, cinéma, nous ont progressivement transformés en spectateurs.


Chaque page est un écran.


Feuilleter un magazine, c’est assister à une parade de mode de la consommation.


Le magazine papier stimule l’imaginaire. Comme la radio.


À la radio, l’écran est plus large, disait le cinéaste américain Orson Welles.


Le magazine est l’ancêtre de l’écran dit intelligent.


Dans le magazine, les images défilent de gauche à droite. Dans un écran numérique, ça va de bas en haut.


En 2015, le philosophe québécois Alain Deneault a lu et relu le même exemplaire du Journal de Montréal. Cela a donné un article, 11 novembre 2015.


Dans tout le journal, des nouvelles hétéroclites se voisinent, comme dans un fouillis. Les publicités lient l’ensemble, dans une tentative de séduction cohérente.


À une époque où il y avait beaucoup de monde dans le métro, plusieurs se prosternaient devant leur écran.


Quand j’étais petit, ça se passait à la messe. Au son de la cloche en laiton, les têtes penchaient. Encore un peu, on entendait bêler.


Pour faire une ligne de coke, il faut se pencher.


Lorsque Gutenberg a publié la première bible en 1455, il a inventé la multiplication des écrans. Dorénavant, un paquet de gens aurait accès à un paquet de contenus identiques.


C’est la conquête des esprits.


En Corée, cette conquête a débuté en 1377. Merci Wiki.


Télévision veut dire voir de loin.


La terre, l’eau, le sable et les nuages ont rempli les premiers écrans de voir de loin de l’humanité.


Pendant longtemps, l’écran a raconté.


Les cavernes et l’art pariétal.


La pierre et les hiéroglyphes.


Le papyrus et les scribes.


L’imprimerie, média de masse.


La radio, le cinéma, la télévision, les magazines et journaux.


L’ordi, le téléphone, la tablette.


On ne raconte plus, on séduit dans le but de vendre.


L’homme descend du singe et le singe descend de l’arbre.


Il vient par ici et je tourne la page.





samedi 3 octobre 2020

Bonjour monsieur Legault

 

Bonjour monsieur Legault,


Je vous écoute avec l’impression que vous n’entendez pas toujours.


J’entends de vous que les Premières Nations forment une communauté comme les autres.


Pas des nations, une communauté.


Comme les italiens de la Petite Italie.


Les maghrébins du Petit Maghreb.


Les Italiens et les Maghrébins, les Grecs, vous et moi, avons en commun d’avoir immigré ici.


Nous vivons tous sur des terrains volés aux Premières Nations.


Les Premières Nations n’ont jamais été vaincues. Nous les avons tassées.


Ces gens sont nos hôtes, nos ainés.


Entre mon hôte et moi, entre mon ainé et moi, il y a un sentiment invisible, quelque chose d’immatériel.


Cela s’appelle le respect.


Le même sentiment que je porte à mon frère Gilles et à ma sœur Michelle, parce qu’ils sont mes ainés.


Guillaume Plouffe et son frère Napoléon.


Les Premières Nations ont en commun d’être des ainés millénaires.


Il y a eu eux et ensuite, il y a eu nous.


Cette semaine, une dame atikamekw est morte de racisme dans un hôpital de Joliette.


L’infirmière a été congédiée, avez-vous dit le lendemain. Vous avez dit cela comme s’il s’était agi d’un geste isolé.


Eh bien non. Il s’agissait d’un geste culturel, de l’ignorance comme une tradition.


Comme s’il manquait à vos yeux un sentiment immatériel. Une vision.


Comme si vous étiez un comptable.


Pour s’occuper du dossier des Premières Nations, vous avez nommé une ministre, une autre comptable. Une spécialiste de l’absence. Et vous l’appuyez. Cela s’appelle de la cohérence.


Vous êtes le premier ministre des québécois.


Les Premières Nations ne sont pas des québécois. Elles sont quelque chose comme un grand peuple, dirait René Lévesque.


Vous écoutez Ghislain Picard, chef de l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador et ne l’entendez pas.


Ghislain Picard comprend très bien ce que vous n’entendez pas.


Il reste poli, comme un grand frère qui a compris. C’est aussi cela, un ainé. Quelqu’un qui comprend en patience.


Une vision vient avec une forme d’intelligence sensible. Ça ne se greffe pas.


Vision et système sont proches parents.


Mon père m’a enseigné l’héritage.


L’Histoire, je l’ai apprise par moi-même. Cela fait partie de l’héritage.


Comment se fait-il que vous ne sachiez pas cela?