vendredi 23 octobre 2020

Noir péjoratif

 

La dernière fois que j’ai parlé du mot « nègre », c’était au début des années 80.


À la taverne Le trappeur, près de l’UQAM, mon ami nigérien Bory Seyni m’explique la colonisation de l’Afrique par les européens.


Ce cours d’histoire fantastique m’est raconté pour la première fois par quelqu’un qui en vit chaque jour les conséquences.


Je reprends. J’assiste au récit fantastique d’une histoire dramatique.


Assis à une table voisine, un touriste Belge demande à mon ami Bory de quel pays il vient.


De la même façon que Bory refuse les frontières européennes de son pays, il refuse de répondre.


Une réponse fantastique à une histoire dramatique.


Les frontières africaines de Bory sont naturelles, les ethnies, les montagnes et les rivières.


Je mesure pour la première fois la profondeur de la blessure.


Je regarde ces jours-ci la série « Les routes de l’esclavage », d’ARTE, sur Savoir.tv. Un livre d’histoire en quatre épisodes.


L’esclavage existe depuis 1500 ans environ.


L’esclavage a toujours été une affaire économique. Les esclaves ont servi de puissance motrice aux économies. Ils ont été remplacés par le pétrole.


Esclave vient de slave. Difficile d’être plus blanc.


L’esclavage est devenu Noir dans les années 1400.


Les mots « Blanc » et « Noir » sont apparus dans les années 1700, en même temps que le racisme.


Sacré Sapiens. Il n’y a que lui pour séparer les couleurs dans une famille de cousins. On se croirait dans une salle de lavage.


Il n’y a que lui pour parler de racisme, alors que l’humanité ne compte qu’une seule race.


Les Africains utilisent le mot « frère ». Je n’en connais pas de plus juste.


Un jour, à Niamey, au Niger, mon ami Bory m’a présenté comme son frère blanc. C’est le plus beau compliment que j’aie jamais reçu.


Si j’enseignais à l’université d’Ottawa, comme cette dame à qui on reproche d’avoir bien fait son travail, je ne m’excuserais pas. Je n’ai pas à m’excuser de faire mon travail. Au mieux, je serais désolé de constater tout ce foutoir de merde, créé par un environnement en délire.


Cette histoire est celle de monde qui vire capot, tout simplement. Du même genre que les hystériques « Slav » et « Kanata ».


Sortir un fusil pour tirer une mouche.


Je recommande Advil.


Le premier ministre Legault parle de dérapage. Ça dérape solide, diraient les mots pour le dire.


Je suggère l’expression « Noir péjoratif ».


Elle servirait au racisme (il n’y a qu’une race humaine, faut-il le rappeler), d’équivalent de « non-voyant », pour « aveugle », et de « malentendant », pour « sourd ». Des mots bonbon pour se donner bonne conscience de ne pas dire les mots pour le dire.


Des mots pour contrôler la pensée des autres.


L’enseignement consiste à présenter les mots dans leur contexte. Le premier mandat de l’enseignant face aux mots est le respect.


Allez viens, Sapiens, on va changer la couche.







1 commentaire:

  1. Salut Luc,

    Toujours un plaisir de te lire. D'autant plus que je partage, encore une fois, ton regard.

    Diego

    RépondreSupprimer