lundi 30 novembre 2020

Silence aveugle

 

Nous assistons à une rencontre qui n’aura pas lieu.


J’aime beaucoup François Legault. Il excelle dans sa gestion de la pandémie. Je ne vois pas qui aurait fait mieux.


François Legault est un pragmatique, un gars de terrain. Un pragmatique, ça travaille dans le concret.


Décider en quelques minutes de fermer une province doit donner un certain vertige.


Il n’a pas badiné avec le disque, comme disait l’humoriste Jean-Guy Moreau.


Depuis le 13 mars, le mot « santé » a tassé les mots « économie », « profit », « rendement » et « croissance ».


L’homme d’affaires a tout de suite vu la priorité. C’est rare en politique.


Le pragmatique s’arrache difficilement du concret.


Dès qu’il tombe dans l’immatériel, le systémique, la finesse, les yeux arrondissent, le sourire fige, la peau pend, il devient gris.


La finesse est un tout petit espace où loge beaucoup de bonheur. Elle ne se trouve pas dans l’objet, mais dans celui qui observe.


C’est le 3ème concerto Brandebourgeois de Bach, joué par le Philarmonique de Los Angeles, dirigé par Pinchas Zukerman.


Pas Karajan, Zukerman.


Pas CD, vinyle.


J’aime beaucoup Ghislain Picard, chef de l’Association des Premières Nations Québec-Labrador. Il représente l’image que je me fais des Premières Nations.


Après avoir vécu des millénaires dans la nature, les Premières Nations ont développé une sensibilité unique.


Enseigner par la parole des milliers d’années d’écoute.


Les ainés racontent aux jeunes un rapport naturel avec l’immatériel.


Quand il est question de finesse et de systémique, Ghislain Picard est là. Je le vois bien discuter avec René Lévesque ou Lucien Bouchard.


Avec François Legault, la rencontre n’aura pas lieu.


Le pragmatique nie le racisme systémique. Son gouvernement a rejeté une motion en ce sens, cette semaine, à l’Assemblée nationale.


Le refus d’adopter le principe de Joyce est reçu comme une gifle par les Attikameks, sous-titre Le Devoir du 28 novembre.


Je suggère que François Legault a seulement été cohérent. Il n’est pas du genre à gifler. Il n’est pas violent.


Le problème du pragmatique n’est pas le systémique, c’est la transcendance, l’immatériel.


François Legault ne voit pas quelque chose, c’est tout. Silence aveugle. Je ne peux pas lui en vouloir.


La non-rencontre d’aujourd’hui est écrite dans le ciel depuis deux ans.


Il y a deux ans, François Legault ne s’est pas présenté à des rencontres avec des chefs des Premières Nations. Comme s’il s’agissait de communautés d’immigrants, comme nous.


Les Premières Nations font partie d’une classe à part. Lisons notre histoire. Pas celle enseignée à l’école, la vraie.


François Legault ne bougera pas.


L’immatériel, c’est ce qui existe et que tu ne vois pas.


Comme tu ne le vois pas, il n’existe pas.