lundi 31 octobre 2016

Maxime




Samedi soir, Maxime a servi en entrée un potage pommes et courges. Comme plat principal, spaghettis avec sauce au bœuf, porc et saucisse italienne. Et comme dessert, tiramisu. Il a tout cuisiné.

Max est mon neveu depuis 27 ans. Il y a deux ans, il m’a demandé un coup de main pour ses travaux de français au cegep. Max écrit très bien, mais il ne le sait pas encore. Il faut simplement intégrer dans l’écriture quelques éléments de réflexion.

Pour un prof, tomber sur un étudiant qui pose des questions et trouve ses réponses, c’est du bonbon. Max a des travaux d’analyses comparées de textes, les plus plates et les plus inutiles travaux en ce qui me concerne.

Max arrive avec des questions. Nous discutons de pistes de solution. Il en choisit une, retourne travailler, revient quelques jours plus tard avec des bases plus solides, et ainsi de suite. Il se sert de moi comme un miroir. Il n’attend pas que je fournisse les réponses sur un plateau d’argent, c’est lui qui tient les commandes. Cela s’appelle une attitude d’entrepreneur.

En deux ans, sa moyenne en français est passée de 59 à 82. C’est la différence entre fixer le plancher et se tenir droit.

Max vit dans le 450 et veut connaitre le 514. Un stage au centre-ville va lui ouvrir les portes de la cathédrale Marie-Reine-du-Monde, de la rue Ste-Catherine, du Golden Square Mile, du Vieux-Montréal, et ainsi de suite. Il veut son appartement au centre-ville.

Il cause politique, actualité, ouvre des livres d’histoire, d’archéologie, regarde des films, cuisine. Il voit plus loin que la plupart de ses profs. On lui a déjà dit qu’il n’irait pas plus loin que le secondaire 5.

Samedi, il parlait de l’École de Technologie Supérieure, l’ETS. Il veut étudier en génie informatique. Il n’y a aucun doute dans ses yeux. Pas de problème, Max. Tu appelles le directeur, tu prends rendez-vous, tu lui dis qui tu es et ce que tu es.

L’identité dépend beaucoup de la personne qui te regarde. Je vois un jeune déluré qui veut, et qui ne doute pas qu’il va. Au cegep de Max, il était mis de côté dans les travaux d’équipe. Les membres de l’équipe ne l’appelaient pas, l’ignoraient. Durant la présentation en classe, c’est comme si Max n’existait pas. Et lui, timide, n’existait pas non plus.

Tout est dans le regard. Si je regardais Max sous l’angle de la paralysie cérébrale, c’est comme si je m’arrêtais à la couleur de la peau ou au fait d’être une femme. Je resterais à la porte d’entrée. L’homophobie, le racisme et le sexisme procèdent tous du même, de petits mots issus de petits esprits.

Le regard peut toujours aller ailleurs. Ainsi, le talent n’a pas de sexe ni de couleur. Il n’a pas la lèpre et n’est pas infirme. Chaque semaine, le dyslexique Charles Tisseyre enseigne les avancements de la science à l’émission Découvertes, à Radio-Canada. Depuis des années, Martin Deschamps chante le rock à partir de ses béquilles. Et le jeune Jérémy Gabriel fait la leçon à l’humoriste Mike Ward dans les médias.

Les mots talent, vision et bonheur ne peuvent sortir de la bouche d’un petit esprit.

Demain ou après-demain, Max va passer les portes de l’ETS pour aller chercher sa bague d’ingénieur. Très bon souper, Max.






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