mercredi 8 avril 2015

L'empreinte


Ce soir, j’ai vu un film comme le deuxième livre d’histoire de mon pays. L’empreinte, c’est son titre, ouvre sur une belle rencontre entre des Français et des autochtones, suivie d’un long mariage de 150 ans. L’empreinte se lit comme un livre. Il ne pouvait être écrit, il raconte ce qui nous est resté de ce mariage entre les hommes, le vent et le bois.



L’empreinte raconte surtout ce qui nous a rapprochés des autochtones pendant tout ce temps. Le goût du partage, le bois, la parole et le respect. La rencontre, le mariage, le métissage.



Suit la trahison des Canadiens-Français envers les autochtones, lors de l’arrivée des Anglais. Il fallait bien paraitre aux yeux des nouveaux voisins. Plus tard, les québécois allaient pourtant se débarrasser de ce cadre pour retrouver la liberté du bois et renouer avec leurs origines. C’était la Révolution tranquille.



Nous sommes loin des livres d’histoire de mon enfance, racontés par des curés. Leurs méchants sauvages qui scalpaient leurs bons martyrs n’ont jamais réussi à conquérir mon imaginaire. Les livres d’histoire des curés n’avaient pas pour but de raconter l’Histoire, mais de créer de nouveaux héros. Cela s’appelle de l’idéologie. Vers 7 ou 8 ans, avant même de fermer mon livre d’histoire, mon esprit était ailleurs. Je ne savais pas pourquoi. À 8 ans, on ne sait pas, on sent.



Bien avant moi, mon père avait eu le même sentiment. Il allait au collège chercher de quoi à manger, les affaires n’étaient pas toujours bonnes à la ferme. En passant devant le presbytère, il voyait le curé, tellement pansu, les veines de son cou allaient éclater. C’était dans la tête de ses 10 ans. Mon père et moi avons senti la même forme de mensonge.



La vie passe. À gauche et à droite, avec les événements et quelques lectures, les bribes d’une histoire vraie s’échaffaudent. L’empreinte est venu placer les fondations de cette histoire.



J’ai lu le premier livre d’histoire de mon pays il y a deux ans, dans le Maine. C’était au temps des mammouths laineux, de l’anthropologue Serge Bouchard. Ce livre devrait être lu dans toutes les écoles. Il ne le sera probablement pas. Les Blancs tiennent trop à être les héros de leur histoire. Mais comment raconter mon histoire sans parler de mon grand frère?



Je suis un descendant de coureurs des bois. Mes ancêtres ne s’appellent pas Napoléon ou Richelieu, mais épinettes, beau dommage et mouches noires. Mes ancêtres se sont installés avec leurs nouveaux frères pour bâtir une nouvelle famille. Mon livre d’histoire est en bois, il date d’avant le papier. Pour la première fois, je me sens à l’aise avec le récit de mes ancêtres.



Serge Bouchard le dit très bien, il faudrait écrire 25 livres et produire 25 films pour raconter notre vraie histoire. Nous commençons quand?







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