lundi 17 mars 2014

Les loups ont gagné (bis)


(Pardonnez-moi de me citer, ce texte a été publié en mars 2011. Par un curieux retour des choses, il revient d'actualité).




Samedi dernier, je regardais sur RDI un excellent documentaire de la BBC sur les quatre saisons dans le parc Yellowstone, au nord-ouest des États-Unis. Samedi, c’était l’hiver. Il fait tellement froid, les arbres sont glacifiés. Ce parc est un décor volcanique unique. Pour la petite histoire, Yellowstone a été le premier parc protégé au monde et on y compte plus de geysers que dans tout le reste de la planète. Dans ce parc, chaque jour est une question de vie ou de mort.

Un wapiti est entouré d’une meute de loups. Il a été séparé de son troupeau et son avenir s’annonce rouge. Bonheur, il coule à proximité une rivière peu profonde, dans laquelle il se réfugie. Les loups ne vont pas dans l’eau, trop froide pour eux. Ils en seront quittes pour attendre. De son côté, le wapiti a aussi un problème, il faudra bien qu’il sorte de l’eau froide. Ce qu’il fait, en s’échappant par la rive opposée.

Le parc Yellowstone héberge des troupeaux de bisons. Le bison peut résister à des températures allant jusqu’à -35ºC. Ce jour-là, il fait -40ºC. Le narrateur prend soin de nous dire que, à cette température, Celcius ou Farenheit, c’est aussi froid, les deux échelles se rejoignent. Un bison seul tente de se frayer un chemin dans le vent et la neige, dont le niveau atteint son poitrail. Il est tellement fatigué qu’il éprouve de la difficulté à hocher de la tête. Les images sont magnifiques, on ne saura pas s’il survivra.

En route vers la liberté, le wapiti rencontre un autre loup. Suspense. Un loup seul ne peut grand chose contre un wapiti, mais on dirait que le wapiti ne le sait pas. Le loup réussit à le ramener vers la meute. Le wapiti saute une fois de plus dans la rivière, les loups attendent une fois de plus, le wapiti sort par l’autre rive et réussit à s’échapper dans la forêt. Ce n’est que partie remise, prévient le narrateur. Quand il y aura plus de neige, les wapitis seront fatigués et les loups, plus efficaces. L’hiver est la saison des loups. Plus il fait froid, plus les proies faiblissent.

Ailleurs, un renard roux chasse la souris. Beaucoup plus léger que le bison, le renard ne cale pas sous la croûte de neige. Où sont les souris? À deux mètres sous la neige. Le renard marche légèrement, s’arrête, écoute, scrute, fait un grand bond, entre tête première sous la neige et en ressort, une souris dans la gueule.

La chasse est parfois inégale. À Yellowstone, même un coyote peut attraper du poisson. Le froid, la force, la ruse et la fatigue sont des armes pour tuer.

Un panneau RDI interrompt l’émission pour une conférence de presse. Fatigué, la barbe longue, Raynald Leblanc, le président du syndicat, annonce la fin du conflit au Journal de Montréal, un interminable lock out de 25 mois, une guerre sans merci déclarée par l’employeur Québécor. Je me demande si Raynald Leblanc a la force de hocher la tête. C’est une victoire patronale, dit-il.

Les loups ont gagné.





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