Sylvain Labarre, président
Agence de publicité LG2
Bonjour Sylvain,
Tu as dû lire comme moi les chroniques de Pierre
Foglia, dans La Presse, à propos de
l’annonce de Bell, conçue par ton agence. Le titre: 5 raisons pourquoi tant de québécois choisissent Bell.
M. Foglia note avec raison que le texte doit se lire 5 raisons pour lesquelles tant de québécois
choisissent Bell. Eh bien, surprise! La semaine suivante, des collègues publicitaires lui ont
répondu que Mais oui,
monsieur le chroniqueur, 5 raisons pourquoi
est mieux reçu par le monde ordinaire que 5 raisons pour lesquelles, trop littéraire... . Wow! Dans les
années 70, les Cyniques disaient Vivons heureux, vivons niaiseux! Il semble que cette blague soit devenue aujourd'hui une approche
publicitaire.
J’ai mal à
mes mots. J’ai été, il y a longtemps, rédacteur d’annonces de Bell, à l’agence
Cossette. À l’époque, Bell prenait un soin maniaque de la qualité du français. L’entreprise
disposait d’un service linguistique qui ne laissait rien passer. Nous devions sortir notre plus belle plume.
Pour la
première fois, je suis soufflé de voir une agence en vue comme LG2 laisser passer
une telle erreur, en format double page, et dans le titre, par-dessus le marché.
Si on ajoute au message original de Bell le commentaire stupide des collègues rédacteurs,
le message insinue maintenant : 5
raisons de promouvoir la pauvreté du français à des gens ordinaires, trop nonos anyway pour s'en rendre compte.
On peut critiquer les publicitaires de bien des maux, et avec raison, ils
font en général du mauvais travail. Mais à ce point?
Les publicitaires ont
l'habitude de prendre des licences avec la langue française, et j'en suis.
Triturer des mots, tordre la syntaxe, créer des formules, mais dans le but de
capter l'attention, jamais dans celui de propager la pauvreté. Le privilège
d’occuper le champ de la communication publique est trop précieux, nous n'avons
pas de droit d'en abuser.
Sur votre site, LG2 présente
sa philosophie d’entreprise, Penser comme
une marque. Si vous assumez vraiment ce que vous écrivez, je comprends
maintenant pourquoi Bell ne pense pas loin.
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