Louis s’intéresse aux graffitis depuis
l’âge de 5 ans. D’où? Aucune idée. À 5 ans, Louis était fasciné par les
graffitis et par les caricatures de Serge Chapleau. Chapleau a vite pris le
bord. Un jour, je lui ai envoyé une photo de mon fils, assis dans sa chambre, les
murs tapissés de ses caricatures. J’espérais une rencontre de mon fils et de
son idole. Pas de réponse. Les caricatures ont pris le bord de la poubelle. Les
vrais bums ne font pas de caricatures dans La
Presse.
À l’école primaire, des flos
impressionnés par les trouvailles de Louis embarquaient dans son trip, jusqu’à
ce que leurs parents capotent. Univers underground,
caché, noir et illégal. C’est justement ce qui fascinait et fascine toujours
Louis. Les copains changeaient d’idée, mais pas Louis. Un jour, des jeunes ont
dessiné des graffitis à l’école. La directrice, pas très intelligente, a
aussitôt condamné Louis à une semaine de travaux communautaires. Je n’ai jamais
aimé cette femme, trop pressée à mettre le couvercle sur la pression, sans
savoir d’où venait le feu. Louis n’est pas un pyromane, idiote.
Il n’est pas évident de gérer le
talent d’un jeune à l’école primaire, surtout quand sa passion n’est ni le
hockey ni le soccer. Un jour, j’ai offert à Louis nos poubelles pour qu’il les
peigne. Durant deux ans, nous avons eu les poubelles les plus funky de la rue.
Avec le temps, la passion de mon
fils ne s’est pas démentie. Il rentrait souvent à 5 heures du matin, après
avoir passé la nuit sous des ponts à dessiner, explorer ou photographier. Comme
le graffiti est un art omerta, j’ai mis du temps à m’en rendre compte. À 5h du
mat, on sent généralement l’alcool. Louis sentait l’air frais.
La bilbiothèque de Louis est remplie
de livres de graffitis du monde entier. L’ordi contient des gigs de photos de graffitis de Montréal
et d’ailleurs. Par la force des choses, cet art est constamment renouvelé; le
même lieu est souvent témoin d’oeuvres nouvelles. Il n’est pas un recoin de la
ville que mon fils n’ait protographié.
Louis a 23 ans, dont 18 de graffitis.
La semaine dernière, ma fille
Stéphanie est allée chez Yavana, un copain de l’école primaire. Yavana est
infographiste graffiteur. D’origine cambodgienne, ses dessins couvrent des murs
dans plusieurs pays. De fil en aiguille, il lui montre une toile que Louis aime
beaucoup. Ce matin, Stéphanie l’a offerte à Louis pour Noël. Ému, le garçon? Il
n’aura pas assez de la journée pour s’en remettre. J’ai appris la base du graffiti de Michel, a dit Yavana à
Stéphanie. Et Michel a tout appris de
Louis. En termes artistiques, à 23 ans, Louis est déjà grand-père, il a deux
générations après lui.
Je n’aime pas Noël, fête obligée du
faux. Mais ce matin, le cadeau n’a rien à voir avec le commerce. C’est celui
d’un garçon qui reçoit tout l’amour de sa soeur.
Dommage que l'on ne puisse pas, comme sur FB, cliquer sur « j'aime ».
RépondreSupprimerUn talent caché ?.. il va falloir qu'on en reparle. J'aimerais bien voir !
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