dimanche 22 janvier 2023

Adonis

 

Ma première rencontre avec la Méditerranée a eu lieu en 75.


Ça s’est passé au Collège Français. Joseph est rapidement devenu un ami. Un gars rieur, brillant, curieux et amusant.


Il m’a fait connaitre les olives noires et sa soeur. Nous avons eu trois enfants.


Sa soeur venait avec une famille. Les cousins de New York, du New Jersey, de Californie, de Londres, de France et d’Égypte.


Joseph m’a emmené chez Daou, un restaurant libanais, sur la rue Faillon. La salle à manger comptait quatre tables et un frigo, dans un coin.


Il y avait une épicerie à côté. J’ai su beaucoup plus tard qu’elle s’appelait Adonis.


C’est comme les Beatles. À un moment, ce nom ne voulait rien dire.


Il m’a emmené au restaurant-comptoir libanais Basha, au premier étage, angle Sainte-Catherine et Mansfield. Abdallah, le propriétaire, nous offrait souvent un dessert.


Nous mangions sur le bord des fenêtres, en regardant la ville passer en bas, sur les trottoirs de la rue Sainte-Catherine. Comme au Pizza Pino, sur les Champs-Élysées, à Paris.


Nous allions chez Daou pour la table et la famille.


Un jour, ma grande fille pleurait. Le serveur l’a prise dans ses bras et l’a emmenée faire un tour du restaurant. Elle est revenue de la cuisine avec un biscuit dans la main. Pati bobo.


Dans pas long, ma fille ira chez Daou avec son conjoint libanais et leur fils.


À l’épicerie Abu Elias, on hache la viande sur place. Comme l’épicier Daigle, sur la rue de l’Église, dans les années 60. Ou monsieur Saindon, à La Conception.


Chez Adonis, je salue les hommes au comptoir des épices, en entrant, à droite. Au fond de l’allée, le personnel de la charcuterie fait parfois goûter le jambon blanc, le salami Genoa ou la bastourma.


À la boucherie, le monsieur avec le dos rond est pressé de bien faire, comme si sa vie en dépendait.


À la pâtisserie, il y a les dames. Je leur dis parfois des compliments en arabe. Il y a une part de séduction dans ces comptoirs.


Tu ne peux pas ne pas aimer des gens comme ça.


Peu importe la taille d’une entreprise, l’épicerie se fait à deux.


J’espère que les employés d’Adonis aiment leur épicerie autant que moi.


Il y a un projet social chez Adonis. Ces gens ont emmené le meilleur de la Méditerranée dans leurs valises. Ils sont arrivés en familles.


Nous les avons reçus avec l’hiver et ça a marché.


J’espère que l’humanité prendra soin de la Méditerranée.


Les gens qui viennent d’autour nous font du bien.





dimanche 15 janvier 2023

J'aime Hydro

 

Changement d’huiles à Hydro-Québec.


La vieille économie tasse la nouvelle.


La vieille économie est celle des hommes. La consommation.


Elle est basée sur le gaspillage. De l’énergie, gaspillage de l’alimentation, gaspillage systémique. Gaspillage.


Construisons des barrages et consommons. La nature est là pour ça.


Monnayons la terre qui nous a mis au monde. Pour le bien des actionnaires. Avançons en arrière.


La nouvelle économie est celle des femmes. La communication.


Aller à la rencontre des autochtones dans un contexte non-transactionnel, dit l’ancienne patronne d’Hydro, dans lapresse.ca. Juste aller s’assoir et jaser.


Nous avons arrêté de jaser en 1760.


Après tout, les terres sur lesquelles Hydro domestique des rivières n’ont pas été cédées par les peuples autochtones.


Nous sommes chez eux.


Hydro est le plus important agresseur du territoire du Québec. Or, le territoire et les autochtones sont des siamois.


La rivière n’est pas une employée.


Le barrage n’est pas un rendement.


Le minerai qu’on extrait blesse l’eau, la terre, l’air et la forêt. Et nous.


Ce n’est pas de l’ésotérisme. C’est 35 000 ans de vie commune avec la nature.


Ce sera pour une autre fois.


Nous avons besoin d’un Hydro et demi de plus, dit le nouveau patron. Et du papier quadrillé, pour inscrire des chiffres.


Tout ça, pour une équation: le Québec est plus riche que l’Ontario.


Avons-nous appris de la pandémie?


Quand toutes les rivières auront été domestiquées, on les montera où, les barrages?


Sur le fleuve. De chaque côté de l’Ile d’Orléans. Un troisième lien, électrique.


Ou sur les routes. Des barrages à péage.


Les voitures électriques remonteront le nouveau courant sur la 132. Comme des poissons.


Si nous étions à court de barrages, nous cesserions de gaspiller.


C’est la nouvelle économie. Pour le bien commun.


Papa était un entrepreneur. Il n’a jamais pensé devenir plus riche qu’un ontarien.


Sa richesse vivait avec lui. Ma mère, deux filles, quatre garçons et des projets.


Papa a acheté des terres pour nous offrir de l’espace.


Quand j’étais petit, je ne voyais pas le bout du terrain. L’herbe était haute.


Quand j’ai grandi, je ne l’ai pas vu davantage. Papa voyait loin.


Il y a ajouté des veaux, des poules, des lapins, des vaches, des tracteurs, des chevaux des moutons. Des constructions.


Il nous a appris à prendre soin des animaux, de la machinerie et des outils. À garder les granges propres. À nous ramasser, à récupérer, réutiliser.


Il nous a appris à travailler.


Mes parents nous ont aidés à réussir une partie de notre vie.


Nous n’avions pas à devenir plus riche que notre voisin.


Nous n’en avions pas besoin. Je n’en ai toujours pas besoin.


L’herbe est assez verte chez nous.


Un bon père de famille tourne la page dans le sens de l’histoire.