Bonjour, monsieur Péladeau,
Aussitôt élu chef du Parti Québécois, vous avez appelé
les citoyens à relire l'histoire des Patriotes.
Je connais bien les Patriotes. C’est un chemin qui longe
la rivière Richelieu. J'exagère. Je montre simplement à quoi ressemble
l'ignorance.
Vous devez savoir trois choses avant de vous lancer dans
ce projet:
Les Québécois forment un peuple d'ignorants qui ne
connait pas son histoire.
Les Québécois forment un peuple d'analphabètes, la
majorité ne sait ni lire ni écrire.
Les Québécois et leurs gouvernements n’ont rien à cirer de
la langue française.
Lorsque, 50 ans après la Révolution tranquille, 53% de la
population est toujours analphabète, et que personne ne s’en inquiète, force
est de constater que la langue française et que l’Éducation n’intéressent
personne. Les Québécois, c'est une minorité qui tient la majorité
dans l'ignorance de son histoire, de sa langue et de son alphabet. Ici, la
langue est affaire de politique, ne parlons pas d’amour.
La nation compte pourtant de magnifiques ambassadeurs. De
mon vivant, Félix, Gilles Vigneault, Gaston Miron, Claude Léveillée, Clémence, Richard
Desjardins. Ceux-là nomment la société que je voudrais être la mienne. Ils lui
donnent ses contours et ses couleurs. Ils font rêver d'une patrie à une
minorité de lettrés. Ils tracent des cercles sur l’eau et chantent l’alphabet.
L'ignorance est érigée en culture au Québec. Tu n'iras
pas à l'école, ta place est aux champs. Tu n'apprendras pas à lire, ton père
n'a pas d'argent. Et si tu sais lire, les curés t'enseigneront la religion et l'ignorance
du reste. Tu es un porteur d’eau, né pour un petit pain.
A la maison, nous n’étions ni porteurs d’eau, ni nés pour
un petit pain. Avec mon entrepreneur de père, il n’y avait pas de place pour se
plaindre, mais pour travailler et bâtir. Il y a là le début d’un pays.
De Jean Lesage à Philippe Couillard, pas un seul
gouvernement n'a amélioré la chose. En 2015, mon peuple est constitué en
majorité d'ignorants et d'illettrés. Et vous, grand propriétaire d'imprimeries,
vous voulez lui faire revoir l'histoire des Patriotes? La
connaissez-vous ?
D’un côté, je suis content de ne pas la connaître, parce
qu’elle vit depuis longtemps sur de fausses prémisses. Depuis ses débuts, mon
histoire officielle met en opposition, elle est contre. Les francos contre les
anglos, les francos contre les Indiens, les anglos contre les Indiens. Je ne
crois plus à cela. J’ai récemment appris que mon histoire a débuté sur du pour.
Avez-vous lu la Déclaration
d’indépendance du Bas-Canada? Signé le 28 février 1838 par Robert Nelson,
président du Gouvernement provisoire de la République du Bas-Canada, le
document déclare, entre autres, qu’on se
servira des langues Française et Anglaise dans toute la matière publique. Qu’il y aura liberté pleine et entière de la
liberté de Presse dans toutes les matières et affaires publiques. Que toute union entre l’Église et l’État est
déclarée abolie, et toute personne a le droit d’exercer librement la religion
et la croyance que lui dicte sa conscience. Nous sommes loin des bêtises de
Bernard Drainville. Et, surtout, que tous
les citoyens auront les mêmes droits; les Sauvages cesseront d’être sujets à
aucune disqualification civile quelleconque, et jouiront des mêmes droits que
les autres citoyens de l’État du Bas-Canada. J’ai rencontré ce texte dans
une chronique de Pierre Bourgault, le 19 mai 2003, à l’émission Indicatif Présent, diffusée à
Radio-Canada. Je ne pense pas que mon pays ait écrit un autre texte à la
hauteur de celui-ci.
Avez-vous vu le documentaire L’Empreinte, présenté au cinéma en avril dernier? On y raconte
comment les Français et les Autochtones ont vécu une alliance qui a duré 150
ans, comment les francos sont autochtones dans leur ADN. Cette rencontre est
unique dans l’histoire des colonisations. Les curés nous l’ont cachée.
Je fais un lien gratuit : les Patriotes ont
inclus les droits des autochtones dans leur Déclaration pour se rapprocher de
leurs frères. Ils cherchaient à se débarrasser de l’emprise des Britanniques,
mais aussi beaucoup à retrouver leurs racines autochtones. C’est la dimension
de notre histoire qui nous manque depuis toujours. Je l’ai découverte il y a un
mois. Depuis ce temps, je jongle à la relecture de nos origines dans une
nouvelle perspective. Je suis de langue française, d’esprit anglo-saxon et
d’ADN autochtone.
Connaître la vérité sur nos débuts change toute la
perspective. Elle humanise autrement l’engagement de nos pères. Elle crée un
lien nouveau entre nous.
Si vous voulez donner une pertinence à votre projet
politique et redorer le blason du PQ pour ce qu’il a été, mais qu’il n’est
plus, vous devez emprunter le chemin des Patriotes. Pas celui des fusils, mais
des écrits. Pas celui du poing en l’air, mais de la main tendue. Une nation ne
se batit pas en disant non à l’autre; une nation se batit en se disant oui.
Vous devez offrir l’alphabet aux analphabètes.
Vous devez remplacer les oeillères francophones par
une vision nationale.
Vous devez refaire l’alliance entre nous, les
immigrants, et nos frères autochtones, les premiers résidants. Nos premiers pas
ici ont commencé par un oui.
Nous pouvons être quelque chose comme
un grand peuple. Êtes-vous en mesure de vous élever à la hauteur
du pays?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire